Matières premières : la Chine annonce la mise en place de contrôles d’exportation sur le gallium (Ga) et le germanium (Ge), ainsi que leurs dérivés
Le 3 juillet, la Chine a annoncé la mise en place de contrôles d’exportation sur le gallium (Ga) et le germanium (Ge), ainsi que leurs dérivés, tous soumis à l’octroi d’une licence préalable d’exportation agréée par le ministère chinois du Commerce (MOFCOM), à partir du 1er aout 2023. Le passage à une logique de licence préalable ne signifie pas mécaniquement que la Chine restreindra les échanges des matières concernées mais lui donne une base juridique pour le faire. La Chine présente ces annonces comme une réponse légitime aux contrôles d’exportation de technologies relatives au secteur des semi-conducteurs adoptées par les Etats-Unis (7 octobre 2022), le Japon (23 mai 2023) et les Pays-Bas (30 juin 2023). Le ministère chinois des Affaires étrangères a déclaré que ces mesures étaient similaires à celles en vigueur dans l’Union Européenne (UE) tandis que le porte-parole du MOFCOM a insisté sur la nature duale des applications de ces minéraux et la légitimité d’imposer des contrôles-export. Cependant, les mesures chinoises se distinguent par leur portée très large et la prise en compte d’intérêts économiques. Il est vrai que l’oxyde de gallium avait fait l’objet de contrôles d’exportation de la part des Etats[1]Unis en août 2022, à cause de ses applications duales. A l’inverse, les mesures annoncées par le MOFCOM sont très larges et concernent l’ensemble des matières premières et les oxydes associés au germanium et au gallium. En outre, l’annonce du MOFCOM renvoie explicitement à la défense de ses intérêts (利益) nationaux, et pas uniquement à la défense de la sécurité nationale (国家安全).
Nationalisation des chaines de valeur
Du point de vue de la politique industrielle, le contrôle des exportations de matériaux primaires (non[1]raffinés) s’inscrit dans la lignée du renforcement des efforts de la Chine pour renforcer la nationalisation des chaines de valeur. Ces mesures permettent ainsi d’inciter les producteurs en aval des chaines de valeur à investir localement pour le raffinage des matières premières, voire la production de certains matériaux composites de semi-conducteurs. D’un point de vue technologique, le potentiel du gallium et du germanium pour doper les performances des semi-conducteurs fait l’objet d’un fort intérêt des acteurs chinois du secteur, que ce soit au niveau académique ou dans l’industrie. Bien que ces annonces mettent en évidence une domination chinoise sur ces chaines de valeur à court terme, celles-ci devraient soutenir une hausse des cours mondiaux de ces matières premières, rendant ainsi viables des projets considérés jusqu’alors comme polluants et peu incitatifs économiquement. A moyen terme, des capacités d’extraction pourraient ainsi être relancées hors de Chine. Le développement de filières de recyclage, ou le recours à des stocks stratégiques, sont également des alternatives
Restrictions chinoises sur les terres rares : pas d’impact sur Taiwan à court terme
La presse reprend les réactions de la ministre de l’Economie, WANG Mei-hua, s’agissant du contrôle sur les exportations chinoises de gallium et de germanium à partir du 1er août prochain : la ministre a souligné que la production chinoise de terres rares était importante mais que ces matériaux étaient exportés vers Taiwan une fois transformés et raffinés, principalement des Etats-Unis et du Japon. A cet égard si l’impact à court terme paraissait limité, un suivi sur le plus long terme était nécessaire. Le bureau du développement industriel (MOEA) a précisé de son côté, qu’en dehors du secteur des semi-conducteurs, les domaines de la fibre optique, des écrans, des équipements médicaux ou encore des cellules photovoltaïques pouvaient s’appuyer sur d’autres matériaux de substitution ; néanmoins, il faudrait envisager vraisemblablement une hausse des prix avec la baisse de l’offre, et le coût de l’extraction des matériaux en dehors de Chine.
